Michel Mousseau est un artiste contemporain défendu par la Galerie Hurtebize à Cannes.
Son travail sur le réel et la couleur, dans les années 1950-70, a évolué vers un art non-figuratif qui puise toujours sa source dans la Nature et les Éléments.
L’artiste nous en livre sa perception singulière à travers des œuvres empreintes d’une grâce et d’une force intemporelles.
Venez découvrir la douce poésie du Vivant proposée par Michel Mousseau sur les cimaises de la Galerie Hurtebize.
Michel Mousseau est d’abord un rêveur et un chercheur, un artiste forcené, à la fois auteur de tableaux, de dessins, travaillant sans relâche ; il s’est confronté à différents sujets, à la figuration, à la non-figuration, et a composé sur tous les formats.
Le peintre est aussi un illustrateur de recueils de poèmes.
Sa manière d’envisager le Monde et de nous la dire dans son œuvre est communicative, et l’on y reconnaît immédiatement la méditation poétique sur l’Homme et le Monde propre à ce libre penseur proche des milieux littéraires.
Son travail entre 1955 et 1970 met en scène des femmes nues et élégantes aux postures pensives, délicatement installées dans des intérieurs aux couleurs suggestives, mais aussi des natures mortes défiant les lois artificieuses de la perspective picturale classique, qui brouillent les pistes et nous invitent au voyage.
Il y a chez Mousseau un contraste entre la douceur des émotions et la vigueur de la technique, un jeu subtil entre rudesse calligraphique et sensibilité du sujet. Et, de façon paradoxale, l’un complète et valorise l’autre.
Le calme pensif de ses personnages contraste avec la force de son pinceau qui capte l’âme des éléments représentés dans des cernes noirs volontaires. Le geste spontané de Michel Mousseau propose aussi un jeu sur les épaisseurs de matière picturale, réaffirmant la matérialité de la peinture, et la présence du peintre. Cette matérialité revendiquée se pose à l’inverse de l’évanescence des figures représentées.
De même, à la subtilité des postures féminines se juxtaposent des effets de contrastes entre ombre et lumière presque saturée, ainsi que le dialogue des tons pastels opposés à une gamme colorée très vive. Ces couleurs fortes sont parsemées dans l’environnement tamisé des personnages à la peau blanche illuminée, et rehaussent de leur vivacité l’aspect presque immatériel de ces personnages livrés à leurs pensées les plus intimes, nous invitant à notre propre introspection.
Cette aventure sensible et empirique proposée par l’artiste se passe de toute notion de temporalité, et transcrit avec justesse la perception du monde de son auteur.
Le Grand Nu à la table proposé par la Galerie Hurtebize, ainsi que le Nu à la chaise Violette incarnent parfaitement cette phase du travail du peintre. Les nus pensifs accoudés à leur chaise, à la fois singuliers et impersonnels, en ce qu’ils représentent la quintessence de l’Homme, ont un visage indéfini. Leur corps vibre d’une lumière qui contraste avec l’intérieur grisé dans lequel il est représenté, et dans lequel s’invitent des plages de couleurs pures, qui annoncent déjà le futur travail abstrait de Mousseau, dès les années 1980, où les plages colorées finissent par envahir la toile.
L’artiste a cependant commencé non pas par figurer l’Homme, mais la Nature. Voici ses réponses aux questions que nous lui avons posées sur son œuvre[1] :
Comment êtes-vous venu à la peinture ?
« Peindre est un désir impératif qui m’est venu naturellement. J’ai très vite eu envie d’échanger le petit cartable d’écolier pour un chevalet de campagne. Je me suis d’abord confronté au paysage. J’habitais Sceaux. Au fond du Parc du château, enjambant la clôture, je me trouvais alors dans un endroit plus sauvage où, solitaire, je pouvais peindre.
Mousseau n’aura de cesse de revenir au travail in situ, au milieu de l’élément naturel, comme en témoigne son dernier travail en résidence au Domaine de Kerguéhennec.[1]
Parlez-nous de votre travail des années 60 et des sujets de vos toiles : nus féminins dans des intérieurs et natures mortes : quelles étaient alors vos sources d’inspiration ?
Ces toiles, je les ai réalisées dès que j’ai eu un véritable atelier à Paris. J’avais précédemment fréquenté un cours du soir boulevard du Montparnasse, et l’Académie Julian rue du Dragon où je travaillais le dessin d’après le modèle vivant.
J’aimais ces corps en mouvement dans l’espace de l’atelier et parmi les objets familiers alentour. L’inspiration, ce n’est pas particulièrement l’érotisme. Le corps, l’atelier, les choses se trouvent mêlés sous une même lumière, tout un monde.
J’ai travaillé là avec acharnement, comme toujours d’ailleurs, selon mon tempérament.
C’est donc le microsome de l’atelier et des nus y posant qui pousse Michel Mousseau à réaliser ses compositions des années 1955/70. S’y exprime donc, comme il le dit lui-même, tout un monde, ou plutôt, toute une réflexion sur le monde, à travers la vision de quelques meubles quotidiens et du mouvement corporel d’une femme. De l’anecdotique naît l’intemporel, du microcosme le macrocosme.
C’est précisément cette phase de son travail que présente la Galerie Hurtebize à Cannes.
Mais le travail de Mousseau ne s’arrête pas là, car ce travailleur acharné évolue et se libère des conventions. Peu à peu, dans les années 1980, ses œuvres muent vers une incarnation du sensible au travers de la couleur. Les formes se dégagent de l’illusionnisme et ne représentent plus le réel, mais les couleurs vibrantes de l’artiste portent en elles des sources toujours reliées au Monde et à la perception que l’artiste se propose de traduire de son pinceau.
Comme de nombreux artistes de cette période, dont certains sont représentés par la Galerie Hurtebize – Hans Hartung, Georges Mathieu, Jean Miotte, André Lanskoy, Gérard Schneider…, Michel Mousseau a choisi l’aventure de la non-figuration. Il nous explique :
C’est une évolution. En effet, ni narrative, ni anecdotique, ma peinture n’en est pas pour autant abstraite. Elle est intimement liée aux éléments du monde qui m’entoure.
Avec force, la couleur a pris toute la place. Les plans et les formes sont simplifiés au détriment des détails. L’espace tend vers le monumental, aussi bien dans les grandes toiles, de la taille d’un homme, que dans les petites toiles de la taille de la main. Par sa matière, la peinture garde cependant l’expression d’intimité et d’intériorité. Il s’agit pour moi de me tenir au plus près de cette lumière que j’ai le sentiment d’être seul à voir, et que je veux saisir, et que je veux transmettre.
A l’instar de certains artistes, comme André Marfaing, Mousseau ne choisit pas l’abstraction pure, mais la non-figuration, grâce à laquelle ce n’est pas le détail ciselé mais la quintessence, l’énergie vitale de ce qu’il voit qu’il traduit pour nous dans son langage coloré et dans ses formes de plus en plus synthétiques.
La couleur, il l’admire chez Delaunay, la force des formes concises, réduites à l’essentiel, chez Cézanne, et l’aspect brut et originel, chez Picasso. C’est ainsi qu’il résume lui-même les artistes qui l’ont inspiré dans sa jeunesse et au cours de sa vie artistique :
Au fil du temps, ce dialogue évolue et dépend des périodes.
Tout au début, j’ai découvert l’atelier de la mère d’un copain d’école. Au mur, d’authentiques toiles de Soutine et Modigliani. Peintre, cette femme avait été leur amie à Montparnasse. Puis, au cours de dessin du lycée Lakanal, le professeur m’ouvrit les yeux sur l’immense et simple modernité de Cézanne. Par la suite, dès les années 50/55, trois grandes toiles m’ont marqué, qui me hantent toujours. Les Ménines de Vélasquez, à Madrid où je séjournais comme étudiant boursier Zellidja, pour l’expression de l’espace et la définition singulière de la place du peintre.
Rythme, grand disque de Robert Delaunay, pour la joie et le dynamisme de la couleur. Les Demoiselles d’Avignon de Picasso, pour le côté primitif aux sources de la peinture, le territoire des origines. Plus tard, la découverte des peintres américains, Jackson Pollock, Richard Diebenkorn…
Ainsi, Michel Mousseau est un peintre passionné qui cherche sans cesse à traduire sa vision du monde avec ses outils et son langage propre, toujours en évolution. Il définit ainsi son rôle de peintre :
Donner à Voir ce que j’ai Vu.
L’échange a beaucoup d’importance. Un regard qui ne partage pas ce que j’ai fait, et mon travail n’est rien. Quand quelqu’un regarde avec intérêt, je me dis que j’ai bien fait. Si ça ne touche pas l’autre, alors je reste sur une île déserte.
Plus généralement tout acte de peindre, quand il est partagé, ouvre une fenêtre et agrandit notre perception du monde. »
L’artiste est donc un passeur, qui transmet sa perception du réel à tous ceux qui lèvent les yeux sur ses œuvres. Ce qu’il veut, ce n’est pas instruire mais provoquer une rencontre, un dialogue créateur entre l’œil du spectateur et l’œuvre.
La Galerie Hurtebize est fière de présenter le travail d’un artiste si singulier dans le panorama de la création des années 1960 jusqu’à nos jours, et vous invite à venir découvrir les visions du monde de Michel Mousseau dans son parcours d’exposition à Cannes.
Marie Cambas
Dernière arrivée dans l’équipe, Marie est diplômée de l’Ecole du Louvre et de la Sorbonne en histoire et en histoire de l’art. Spécialisée en peinture ancienne, elle se tourne ensuite vers l’art Moderne et intègre la galerie en 2018.
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[1] Correspondance entre Michel Mousseau et Marie Cambas, datée du 11 décembre 2019, par e-mail, retranscrite intégralement avec l’accord de l’artiste.
[2] Voir Michel MOUSSEAU, Domaine de Kerguéhennec, carnet de résidence publié à l’occasion de l’exposition présentée du 3 mars au 2 juin 2019, Département du Morbihan, Presses du Cloître Imprimeurs, Saint-Thonan, 2018.