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La BRAFA – Brussels Art Fair, un salon d’exception.

Du 26 janvier au 2 février prochain va se dérouler le prestigieux salon BRAFA, pour sa 65ème édition.

Créée en 1956, cette foire internationale d’art – l’une des plus anciennes – est entrée dans le top 5 des grands rendez-vous annuels incontournables pour les amateurs et collectionneurs. Chaque année, elle marque le top départ de l’année artistique, annonçant déjà les différentes foires qui se succéderont. On la considère désormais comme un baromètre du marché de l’art, reflet fiable des nouvelles tendances.

Chaque année en effet, ce sont environ 66 000 personnes, amateurs et collectionneurs, qui s’y pressent pour découvrir et acquérir les pièces exposées.

Une large sélection de galeries triées sur le volet, spécialisées aussi bien en antiquités qu’en art moderne ou contemporain y présentent des œuvres d’une rare qualité. Ce sont au total 133 des plus belles galeries mondiales, issues de 14 pays différents, qui y participent. Elles représentent plus de 20 spécialités, de l’art Pré-colombien à la peinture flamande du XVIIIème siècle, en passant par le bijou vintage et le livre de collection, jusqu’à l’abstraction des années 1950 et à l’art conceptuel d’aujourd’hui. Il s’agit donc d’une sélection qui balaie les époques et les styles, mêlant tous les objets d’arts, et n’ayant pour seul critère que celui de l’excellence.

Plus de 100 experts travaillent pour cela à l’authentification des pièces proposées, assurant un contrôle sans faille de la provenance et de la certification des objets d’art.

Depuis 2004, la BRAFA prend place à Tour&Taxis, un magnifique complexe immobilier datant de la première ère industrielle bruxelloise en brique rouge, de plus de 15 000 m2.

Chaque année, des personnalités importantes du monde politique ou artistique parrainent ce salon, lui conférant un prestige toujours plus important.

La Galerie Hurtebize participe depuis de nombreuses années à ce rendez-vous immanquable, proposant un choix d’œuvres issues de l’art d’après-guerre français dans un stand où la scénographie met en avant un parcours d’exposition toujours original.

Georges Mathieu, Hans Hartung, Bernard Buffet, Victor Vasarely, André Marfaing ou Jean Miotte sont les noms désormais associés à la Galerie, qui a à cœur de promouvoir l’œuvre de ces grands artistes de l’art moderne.

Cette année, la Galerie proposera aussi en exclusivité le travail d’autres personnalités dont le renom n’est plus à faire : Marc Chagall, Wifredo Lam, Jean Cocteau ou encore Christo seront aussi présents sur les cimaises du stand 57A, qui s’étalera sur plus de 100 m2.

Focus : Une œuvre exceptionnelle de Jean Cocteau sur le stand 57A

L’œuvre de Jean Cocteau proposée par la Galerie Hurtebize est inédite, puisqu’elle figure dans le film Le Testament d’Orphée, dernier film et véritable testament de l’artiste daté de 1959.

Orphée à la Lyre est une œuvre à la craie blanche sur tableau noir, d’un mètre cinquante de haut sur deux mètres de large.

On la voit au début et à la fin du film, en guise d’incipit et de conclusion, en train de « se » réaliser. En effet, le trait blanc semble se former de lui-même, Cocteau s’effaçant pour mettre en scène cette auto-création du portrait du héros avec son instrument de musique.

Cette œuvre, tout comme le film, est en réalité un auto-portrait. Cocteau s’imagine en Orphée maîtrisant tous les arts, mais ayant un rapport spécial avec la Mort. Dans le mythe antique, le héros à la lyre est autorisé à descendre aux Enfers pour aller y chercher Eurydice, son épouse. La seule condition pour la ramener parmi les vivants est de ne pas se retourner. Mais alors qu’ils sont presque parvenus au bout du chemin, Orphée se retourne, et Eurydice disparaît à jamais.

Jean Cocteau a réalisé une pièce de théâtre ainsi que deux longs métrages sur ce mythe, qui traverse toute son œuvre, comme une obsession. Cependant, ce n’est pas sur la perte de l’être cher que se focalise son travail, à l’instar du mythe, mais sur l’inéluctabilité de la Mort, l’attraction qu’elle opère, seul phénomène auquel ne peut résister Orphée, artiste aux mille talents, qui séduit pourtant du son de sa lyre enchantée la faune, la flore, et même les Dieux. Rien ne lui résiste, si ce n’est l’Hadès qui s’ouvre à ses pieds.

Dans Le Testament d’Orphée, cette Mort se joue de l’artiste, qui l’attend désespérément, dans un temps infini qui s’étire d’anecdote en anecdote. Cocteau y joue lui-même un Orphée  condamné à errer dans le temps et l’espace, rencontrant dans différentes temporalités toutes les personnes qui ont compté dans sa vie personnelle, de Picasso à Jean Marais.

L’œuvre Orphée à la Lyre, qui commence et termine le film, est donc d’une grande importance pour cet artiste polymorphe, à la fois cinéaste, écrivain, dessinateur et peintre.

Il est la dernière image de la bande originale, le point final de la carrière de Jean Cocteau ; en un mot, le véritable testament de l’artiste.


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Marie Cambas

Dernière arrivée dans l’équipe, Marie est diplômée de l’Ecole du Louvre et de la Sorbonne en histoire et en histoire de l’art. Spécialisée en peinture ancienne, elle se tourne ensuite vers l’art Moderne et intègre la galerie en 2018.


Crédit photo : BRAFA 2019 – Stand Galerie Hurtebize © Fabrice Debatty – www.debatty.com


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Découverte : Rencontre avec Michel MOUSSEAU

Michel Mousseau est un artiste contemporain défendu par la Galerie Hurtebize à Cannes.

Son travail sur le réel et la couleur, dans les années 1950-70, a évolué vers un art non-figuratif qui puise toujours sa source dans la Nature et les Éléments.

L’artiste nous en livre sa perception singulière à travers des œuvres empreintes d’une grâce et d’une force intemporelles.

Venez découvrir la douce poésie du Vivant proposée par Michel Mousseau sur les cimaises de la Galerie Hurtebize.

Michel Mousseau est d’abord un rêveur et un chercheur, un artiste forcené, à la fois auteur de tableaux, de dessins, travaillant sans relâche ; il s’est confronté à différents sujets, à la figuration, à la non-figuration, et a composé sur tous les formats.

Le peintre est aussi un illustrateur de recueils de poèmes.

Sa manière d’envisager le Monde et de nous la dire dans son œuvre est communicative, et l’on y reconnaît immédiatement la méditation poétique sur l’Homme et le Monde propre à ce libre penseur proche des milieux littéraires.

Son travail entre 1955 et 1970 met en scène des femmes nues et élégantes aux postures pensives, délicatement installées dans des intérieurs aux couleurs suggestives, mais aussi des natures mortes défiant les lois artificieuses de la perspective picturale classique, qui brouillent les pistes et nous invitent au voyage.

Il y a chez Mousseau un contraste entre la douceur des émotions et la vigueur de la technique, un jeu subtil entre rudesse calligraphique et sensibilité du sujet. Et, de façon paradoxale, l’un complète et valorise l’autre.

Le calme pensif de ses personnages contraste avec la force de son pinceau qui capte l’âme des éléments représentés dans des cernes noirs volontaires. Le geste spontané de Michel Mousseau propose aussi un jeu sur les épaisseurs de matière picturale, réaffirmant la matérialité de la peinture, et la présence du peintre. Cette matérialité revendiquée se pose à l’inverse de l’évanescence des figures représentées.

De même, à la subtilité des postures féminines se juxtaposent des effets de contrastes entre ombre et lumière presque saturée, ainsi que le dialogue des tons pastels opposés à une gamme colorée très vive. Ces couleurs fortes sont parsemées dans l’environnement tamisé des personnages à la peau blanche illuminée, et rehaussent de leur vivacité l’aspect presque immatériel de ces personnages livrés à leurs pensées les plus intimes, nous invitant à notre propre introspection.

Cette aventure sensible et empirique proposée par l’artiste se passe de toute notion de temporalité, et transcrit avec justesse la perception du monde de son auteur.

Le Grand Nu à la table proposé par la Galerie Hurtebize, ainsi que le Nu à la chaise Violette incarnent parfaitement cette phase du travail du peintre. Les nus pensifs accoudés à leur chaise, à la fois singuliers et impersonnels, en ce qu’ils représentent la quintessence de l’Homme, ont un visage indéfini. Leur corps vibre d’une lumière qui contraste avec l’intérieur grisé dans lequel il est représenté, et dans lequel s’invitent des plages de couleurs pures, qui annoncent déjà le futur travail abstrait de Mousseau, dès les années 1980, où les plages colorées finissent par envahir la toile.

L’artiste a cependant commencé non pas par figurer l’Homme, mais la Nature. Voici ses réponses aux questions que nous lui avons posées sur son œuvre[1] :

Comment êtes-vous venu à la peinture ?
« Peindre est un désir impératif qui m’est venu naturellement. J’ai très vite eu envie d’échanger le petit cartable d’écolier pour un chevalet de campagne. Je me suis d’abord confronté au paysage. J’habitais Sceaux. Au fond du Parc du château, enjambant la clôture, je me trouvais alors dans un endroit plus sauvage où, solitaire, je pouvais peindre.

Mousseau n’aura de cesse de revenir au travail in situ, au milieu de l’élément naturel, comme en témoigne son dernier travail en résidence au Domaine de Kerguéhennec.[1]

Parlez-nous de votre travail des années 60 et des sujets de vos toiles : nus féminins dans des intérieurs et natures mortes : quelles étaient alors vos sources d’inspiration ?

Ces toiles, je les ai réalisées dès que j’ai eu un véritable atelier à Paris. J’avais précédemment fréquenté un cours du soir boulevard du Montparnasse, et l’Académie Julian rue du Dragon où je travaillais le dessin d’après le modèle vivant.
J’aimais ces corps en mouvement dans l’espace de l’atelier et parmi les objets familiers alentour. L’inspiration, ce n’est pas particulièrement l’érotisme. Le corps, l’atelier, les choses se trouvent mêlés sous une même lumière, tout un monde.
J’ai travaillé là avec acharnement, comme toujours d’ailleurs, selon mon tempérament.

C’est donc le microsome de l’atelier et des nus y posant qui pousse Michel Mousseau à réaliser ses compositions des années 1955/70. S’y exprime donc, comme il le dit lui-même, tout un monde, ou plutôt, toute une réflexion sur le monde, à travers la vision de quelques meubles quotidiens et du mouvement corporel d’une femme. De l’anecdotique naît l’intemporel, du microcosme le macrocosme.

C’est précisément cette phase de son travail que présente la Galerie Hurtebize à Cannes.

Mais le travail de Mousseau ne s’arrête pas là, car ce travailleur acharné évolue et se libère des conventions. Peu à peu, dans les années 1980, ses œuvres muent vers une incarnation du sensible au travers de la couleur. Les formes se dégagent de l’illusionnisme et ne représentent plus le réel, mais les couleurs vibrantes de l’artiste portent en elles des sources toujours reliées au Monde et à la perception que l’artiste se propose de traduire de son pinceau.

Comme de nombreux artistes de cette période, dont certains sont représentés par la Galerie HurtebizeHans Hartung, Georges Mathieu, Jean Miotte, André Lanskoy, Gérard Schneider…, Michel Mousseau a choisi l’aventure de la non-figuration. Il nous explique :

C’est une évolution. En effet, ni narrative, ni anecdotique, ma peinture n’en est pas pour autant abstraite. Elle est intimement liée aux éléments du monde qui m’entoure.
Avec force, la couleur a pris toute la place. Les plans et les formes sont simplifiés au détriment des détails. L’espace tend vers le monumental, aussi bien dans les grandes toiles, de la taille d’un homme, que dans les petites toiles de la taille de la main. Par sa matière, la peinture garde cependant l’expression d’intimité et d’intériorité. Il s’agit pour moi de me tenir au plus près de cette lumière que j’ai le sentiment d’être seul à voir, et que je veux saisir, et que je veux transmettre.

A l’instar de certains artistes, comme André Marfaing, Mousseau ne choisit pas l’abstraction pure, mais la non-figuration, grâce à laquelle ce n’est pas le détail ciselé mais la quintessence, l’énergie vitale de ce qu’il voit qu’il traduit pour nous dans son langage coloré et dans ses formes de plus en plus synthétiques.

La couleur, il l’admire chez Delaunay, la force des formes concises, réduites à l’essentiel, chez Cézanne, et l’aspect brut et originel, chez Picasso. C’est ainsi qu’il résume lui-même les artistes qui l’ont inspiré dans sa jeunesse et au cours de sa vie artistique :

Au fil du temps, ce dialogue évolue et dépend des périodes.
Tout au début, j’ai découvert l’atelier de la mère d’un copain d’école. Au mur, d’authentiques toiles de Soutine et Modigliani. Peintre, cette femme avait été leur amie à Montparnasse. Puis, au cours de dessin du lycée Lakanal, le professeur m’ouvrit les yeux sur l’immense et simple modernité de Cézanne. Par la suite, dès les années 50/55, trois grandes toiles m’ont marqué, qui me hantent toujours.
Les Ménines de Vélasquez, à Madrid où je séjournais comme étudiant boursier Zellidja, pour l’expression de l’espace et la définition singulière de la place du peintre.
Rythme, grand disque de Robert Delaunay, pour la joie et le dynamisme de la couleur. Les Demoiselles d’Avignon de Picasso, pour le côté primitif aux sources de la peinture, le territoire des origines. Plus tard, la découverte des peintres américains, Jackson Pollock, Richard Diebenkorn…

Ainsi, Michel Mousseau est un peintre passionné qui cherche sans cesse à traduire sa vision du monde avec ses outils et son langage propre, toujours en évolution. Il définit ainsi son rôle de peintre :

Donner à Voir ce que j’ai Vu.

L’échange a beaucoup d’importance. Un regard qui ne partage pas ce que j’ai fait, et mon travail n’est rien. Quand quelqu’un regarde avec intérêt, je me dis que j’ai bien fait. Si ça ne touche pas l’autre, alors je reste sur une île déserte.
Plus généralement tout acte de peindre, quand il est partagé, ouvre une fenêtre et agrandit notre perception du monde
. »

L’artiste est donc un passeur, qui transmet sa perception du réel à tous ceux qui lèvent les yeux sur ses œuvres. Ce qu’il veut, ce n’est pas instruire mais provoquer une rencontre, un dialogue créateur entre l’œil du spectateur et l’œuvre.

La Galerie Hurtebize est fière de présenter le travail d’un artiste si singulier dans le panorama de la création des années 1960 jusqu’à nos jours, et vous invite à venir découvrir les visions du monde de Michel Mousseau dans son parcours d’exposition à Cannes.


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Marie Cambas

Dernière arrivée dans l’équipe, Marie est diplômée de l’Ecole du Louvre et de la Sorbonne en histoire et en histoire de l’art. Spécialisée en peinture ancienne, elle se tourne ensuite vers l’art Moderne et intègre la galerie en 2018.

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[1] Correspondance entre Michel Mousseau et Marie Cambas, datée du 11 décembre 2019, par e-mail, retranscrite intégralement avec l’accord de l’artiste.

[2] Voir Michel MOUSSEAU, Domaine de Kerguéhennec, carnet de résidence publié à l’occasion de l’exposition présentée du 3 mars au 2 juin 2019, Département du Morbihan, Presses du Cloître Imprimeurs, Saint-Thonan, 2018.


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Gérard SCHNEIDER : Le lyrisme à l’état brut

Gérard Schneider a sans aucun doute le coup de brosse le plus brut et spontané de tous les artistes abstraits lyriques des années 1950-1960. Sa gestuelle est incomparable et reconnaissable ; on ne peut la confondre avec la rigidité contrôlée d’un Hans Hartung, la calligraphie orientaliste d’un Georges Mathieu, ou la gestuelle jazzy d’un Jean Miotte.

Son geste volontairement plus brouillon représente ce que l’art abstrait lyrique a de plus essentiel. C’est pourquoi le grand critique Michel Ragon n’hésite pas à écrire : « L’abstraction lyrique s’est surtout incarnée dans Gérard Schneider, comme le cubisme dans Picasso »[1].  Cela ne veut pas dire que Gérard Schneider soit l’initiateur du mouvement, ni son unique représentant, cela veut dire que les envolées picturales brutales de Schneider incarnent la quintessence même de ce mouvement et de ses intentions, à savoir un élan spontané et intérieur se reflétant par une gestuelle abstraite instinctive.

Pourtant, Gérard Schneider a une éducation artistique des plus classiques. Né d’un père ébéniste à Neuchâtel, il étudie l’art traditionnel et académique en Suisse avant d’arriver à Paris, à l’âge de vingt ans, afin d’étudier à l’École des Arts Décoratifs puis aux Beaux-Arts. Tenté un moment par le cubisme, il se plaît à répéter « j’aime tous mes classiques », mais dès l’année 1935, il abandonne la figuration pour l’art abstrait. A partir de 1930 déjà, son style s’achemine vers l’abstraction, et est ainsi qualifié par Michel Ragon : « l’élan du geste, une violence contenue, la lueur d’une coulée de pâte blanche »[2]. Pendant un temps, Schneider hésite entre la non-figuration et l’abstraction – voir notre Gros Plan en fin d’article.

Proche du mouvement surréaliste, Schneider écrit des poèmes, où cette fureur silencieuse s’exprime aussi bien que lorsqu’il prend ses pinceaux. Daniel Chabrissoux en réfère à Loïs Schneider dès juillet 1991 : « Le trait est un élément dominant, un travail de vitesse où le mouvement est primordial, mais aussi cette rupture avec la nature où l’on cherche à l’intérieur de soi la source de l’inspiration.  C’est le surréalisme qui a apporté cela, ce fut très important pour la naissance de l’abstraction lyrique et aussi pour les artistes américains. »[3]

Gérard Schneider ne se rapproche pas alors des autres artistes de sa génération, qui tendent vers une abstraction plutôt géométrique. Artiste érudit, son inspiration vient à l’inverse du surréalisme, de cette manière nouvelle de chercher un élan créateur au plus profond de son subconscient et de son intimité.

A la fin de la guerre, il commence à exposer avec des artistes abstraits tels que Marie Raymond, Jean Deyrolle ou Hans Hartung, avec lequel il créée un groupe informel d’artistes qui souhaitent travailler l’abstraction d’une manière nouvelle, en se laissant porter par leur élan créateur. S’y rallient Michel Atlan, Serge Poliakoff, Pierre Soulages et d’autres qui deviendront les grands représentants de l’art abstrait lyrique en France.

C’est surtout avec Hans Hartung et Pierre Soulages que Schneider forme un trio durable aux multiples expositions et succès.

Les années 50 sourient en effet à Gérard Schneider, alors au faîte de sa gloire.

Charles Estienne, le grand critique, écrit dans la revue Combat le 30 avril 1947 : « A la galerie Lydia Conti, Schneider s’est attaqué au problème le plus difficile, celui de tout dire dans une forme abstraite, en s’en tenant aux deux dimensions du plan. Le voici aujourd’hui en pleine possession de ses moyens d’expression ; tantôt il nous semble romantique, se fiant plus à son graphisme et à son trait, aux taches de couleurs éclatantes, pour s’exprimer d’une manière lyrique, tantôt, il semble plus classique, et supprime tout espace inutile dans le jeu serré des formes. Mais sa peinture a toujours un contenu intérieur nécessaire et suffisant, et l’accord coloré qui résume finalement le tableau est d’une richesse sans emphase et d’une sûreté qu’il faudrait être aveugle pour nier. Belle leçon que je dédie à beaucoup de jeunes peintres. »[4]

Tout comme les autres représentants de l’art abstrait lyrique, Hans Hartung, Georges Mathieu, Pierre Soulages, André Lanskoy et les autres, Gérard Schneider est présent sur les cimaises de la Galerie Hurtebize à Cannes, qui promeut cette période de création libre et intense dans la France de l’après-Guerre.

L’œuvre Opus 71-C de Schneider, une huile sur toile de 1957, est dans la lignée du travail décrit par Charles Estienne. L’artiste y développe son lyrisme si brut et reconnaissable, à coups de brosse large denses en matière, éclairés par des taches de couleurs qui contrastent avec le noir des barreaux qui s’étalent sur le fond bleu nuit de la composition. Sa proximité avec Hartung et Soulages se ressent dans cette composition où figurent les fameuses « poutres » décrites par Hans Hartung, typiques selon lui des artistes lyriques et des abstraits américains de cette période[5]. Ainsi, par ses formes et ses harmonies colorées, cette œuvre puissante témoigne de l’œuvre spontané de Gérard Schneider, qui a sans cesse cherché son inspiration au plus profond de lui-même.

Gros plan : l’Art selon Gérard Schneider : Art non figuratif ou abstraction ?

Beaucoup d’artistes de cette période abandonnent la figuration de leurs débuts pour l’abstraction. Mais il est difficile de définir leur art ; est-ce de la non-figuration ou bien de l’abstraction ? André Marfaing, par exemple, se refuse à employer le terme d’art abstrait, lui préférant celui d’art « non-figuratif ».

Qu’en est-il de Gérard Schneider ?

C’est Michel Ragon, dans sa magnifique somme sur le peintre, qui nous l’explique :

Il cite Gérard Schneider, qui explique avoir abandonné l’art figuratif vers 1937 – en réalité, dès les années 1930.  « J’abordais l’abstrait, vers 1937, par quelques créations imaginatives directes, dira-t-il en 1985 à Gérard Xuriguera. Ce n’était pas encore de l’abstrait, mais de l’abstraction. »

Ce qui différencie l’abstrait de l’abstraction, Gérard Schneider reviendra souvent sur ce sujet (…). Avant la guerre, Schneider abstractise des formes ; après la guerre, il travaillera directement dans l’abstrait, sans aucune référence au monde visible. »[6]

C’est en 1945 que Schneider affirme par une phrase-manifeste le tournant de son orientation. Il est alors définitivement passé du côté de l’abstrait, sans référence au réel, et se sépare des non-figuratifs -Bissière, Bazaine, Manessier, Lapicque et les autres, qui conservent des références au réel dans leur peinture.

En effet, c’est au Salon des surindépendants de 1945, que Schneider expose une peinture, Les Pendus, qui n’a de figuratif que le titre. Il inscrit sous la reproduction de ce tableau son adhésion à l’art abstrait, qui s’éloigne définitivement du non-figuratif : « Les nouvelles possibilités de la peinture abstraite s’orientent vers un contenu expressif et dramatique de la création de ses formes. Dans l’abstraction la peinture trouve l’indispensable à sa fin technique et explosive en excluant les éléments extérieurs inutiles. »

Ainsi, l’abstrait comporte une expressivité qui devient une fin en soi. C’en est fini du rapport au réel dans la création, il n’y a que le réel des émotions « explosives » de Gérard Schneider lui-même, et de sa gestuelle picturale qui s’affirme en tant que telle, sans volonté illusionniste.

Venez retrouver nos œuvres de Gérard Schneider exposées à la Galerie Hurtebize à Cannes, ou sur notre site internet www.galerie-hurtebize.com


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Marie Cambas

Dernière arrivée dans l’équipe, Marie est diplômée de l’Ecole du Louvre et de la Sorbonne en histoire et en histoire de l’art. Spécialisée en peinture ancienne, elle se tourne ensuite vers l’art Moderne et intègre la galerie en 2018.

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[1] Michel RAGON, Schneider, Expressions Contemporaines, Angers, 1998.

[2] Michel RAGON, Schneider, Expressions Contemporaines, Angers, 1998, p. 19.

[3] Propos rapportés et publiés par Michel Ragon, in Schneider, Expressions Contemporaines, Angers, 1998, p. 26.

[4] Charles ESTIENNE, in Combat, 30 avril 1947.

[5]Hans Hartung, Autoportrait, Les presses du réel, 2016, première édition Grasset, 1976, p.223 : « Avant la guerre, mes taches avaient commencé à aller de pair avec de larges barres sombres préfigurant ces « poutres » qui, pour beaucoup de peintres (Franz Kline, Soulages, et moi-même encore), allaient jouer, après-guerre, un grand rôle. »  

[6] Michel RAGON, Schneider, Expressions Contemporaines, Angers, 1998, p. 19.


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Actualité : Nos nouvelles œuvres de Jean Miotte

Depuis plus de dix ans, la Galerie Hurtebize à Cannes défend l’œuvre d’un pionnier de la peinture informelle, Jean Miotte. Cet artiste est à classer parmi les plus grands peintres de l’art abstrait français, et de la grande aventure de l’art moderne en général.

Caractérisé par ses tâches colorées et sa calligraphie noire mouvementée, l’œuvre de Jean Miotte s’étend sur plus de 60 ans.

Dès les années 1950, l’artiste bascule dans l’art abstrait, influencé par son ami futuriste Gino Severini, qui réfléchit alors à la manière de peindre le mouvement et le passage du temps.

Miotte évolue vers la juxtaposition de larges touches de couleurs pures, sur des toiles de format moyen. L’harmonie et le rythme colorés lui sont inspirés de ses deux passions : la danse et le jazz.

Cette période de l’œuvre du maître est sans doute la mieux représentée par la Galerie Hurtebize, qui en propose plusieurs tableaux.

L’artiste expérimente dans un second temps la calligraphie noire sur fond non préparé, blanc ou légèrement coloré, technique nourrie de la philosophie zen alors très diffusée parmi les artistes français. À l’harmonie musicale des couleurs succède donc la gestuelle spontanée de l’écriture du moi. La Galerie Hurtebize à Cannes compte sur les cimaises de son parcours de visiste deux grands formats illustrant à merveille cette période : Miotte 81 et Miotte 88.

C’est durant la phase de maturité, au tournant des années 2000, sur des formats de plus en plus importants, que Miotte combine le mieux ces deux orientations, couleur et graphie, dans une gestuelle enlevée et dansante, pour donner lieu à un véritable « cosmos intime des sensations »[1].

Comme le souligne encore Karl Ruhrberg, l’art de Miotte est un art de l’émotion, qui se manifeste par « la revendication de la couleur vivante, coulant à flots, de lignes impulsives et de l’écriture picturale spontanée. »[2] Cette dernière dimension de son œuvre est également bien représentée par la Galerie Hurtebize, spécialisée dans les grands formats vibrants de tonalités pures de Jean Miotte.

L’œuvre Composition, 2001 est notamment issue de cette phase de réflexion du maître de l’art abstrait. En la regardant, on comprend bien la description de ces grandes toiles mouvementées par Serge Leczner : « Son travail de matière s’allège. Le geste devient une fluidité, un flux majeur, celui de l’émotion. »[3]

Artiste au rayonnement international, Jean Miotte a travaillé entre la France, Zurich et New-York, où il a créé une fondation et un musée. Cet artiste si atypique dans le panorama culturel français de l’après-guerre connaît un intérêt qui dépasse les frontières.

Son œuvre est à découvrir dans le parcours d’exposition de la Galerie Hurtebize à Cannes, non loin de Pignans, dans le Var, où l’artiste avait installé son atelier dès 1965, inspiré par les tonalités chaudes et enivrantes du Sud de la France, à l’instar d’Hans Hartung ou Victor Vasarely, deux autres pionniers de l’art abstrait à la française qui figurent également sur les cimaises de la Galerie Hurtebize.


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Dernière arrivée dans l’équipe, Marie est diplômée de l’Ecole du Louvre et de la Sorbonne en histoire et en histoire de l’art. Spécialisée en peinture ancienne, elle se tourne ensuite vers l’art Moderne et intègre la galerie en 2018.

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[1] RURHBERG Karl, Miotte, La différence, Editions La différence, Paris, 1998, P.18.

[2] RURHBERG Karl, Miotte, La différence, Editions La Différence, Paris, 1998, p. 14.

[3] LENCZNER Serge, Miotte, La permanence de l’absolu, Villedieu-sur-Inges, 2006, p.23.

JEAN MIOTTE

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Jacques Germain : trois toiles signées rejoignent la Galerie Hurtebize !

La peinture abstraite au couteau de Jacques Germain, à la fois structurée et lyrique, est défendue depuis de nombreuses années par la Galerie Hurtebize à Cannes, spécialisée en art moderne.

Jacques Germain est en effet à considérer comme l’un des grands acteurs de l’art abstrait lyrique de l’après-guerre en France, au même titre que Georges Mathieu, Jean Miotte, Hans Hartung, Pierre Soulages, André Lanskoy ou Gérard Schneider.

Seul artiste à avoir jamais étudié au Bauhaus de Dessau, et à y avoir suivi les cours de Kandinsky et Albers, son style est unique, et rappelle celui d’un autre immense artiste de cette époque, ayant travaillé en parallèle aux États-Unis : le canadien Jean-Paul Riopelle. Leur sensibilité s’est écrite au même moment, sans qu’ils aient connaissance l’un de l’autre, en une musique picturale très similaire. Outre ce rapprochement, le style de Jacques Germain est unique, surtout si on le compare aux autres abstraits lyriques français.

Du Bauhaus, Germain conserve un amour de la structuration par lignes verticales et diagonales, que l’on retrouve dans toutes ses compositions. Cependant, c’est entre les lignes que ses envolées de couleurs se juxtaposent pour former les rythmes vibrants qu’on lui connaît. La force de sa peinture réside dans la touche au couteau, brève, violente, et répétée, dans un travail tout en matière qui retient l’œil. La recherche sur la couleur est aussi spécifique à l’artiste ; à l’instar des grands maîtres hollandais du XVIIème siècle, Jacques Germain élabore une peinture tonale faite de camaïeux et qui se fondent en une unité colorée à dominante tantôt bleue, tantôt rouge, tantôt plus pale.

Dans son Dictionnaire des peintres intitulé L’École de Paris 1945-1965[1], Lydia Harambourg revient sur cet artiste abstrait à l’expression si personnelle. Elle nous offre un aperçu dense et précis de la production de Jacques Germain, disponible dans le gros plan de cet article. La carrière de Germain, à la suite de ses études, se tisse entre Paris, l’Allemagne et la Suisse. Il y côtoie de nombreux artistes, comme Serge Poliakoff, Georges Mathieu ou Jean Fautrier.

C’est dans cette émulation constante où chacun développe ses propres tics picturaux que le style de Jacques Germain s’affine et s’affirme. La Galerie Hurtebize retrace donc son parcours en proposant ses œuvres parmi celles des autres peintres de la scène parisienne des années d’après-guerre ; Schneider, Hartung, Mathieu, Soulages… Dans le parcours de l’exposition permanente, c’est cette diversité qui est proposée à la vue du spectateur, pour se promener le temps de la visite au cœur de l’École de Paris, au tournant de la Seconde guerre Mondiale, au cœur de l’art abstrait et de la modernité.

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Gros plan : Lydia Harambourg, pour une biographie de Jacques Germain.

Très tôt défendue par Jean Grenier, la peinture de Germain s’inscrit dans ce vaste mouvement de l’art abstrait en France, qui se développe après la guerre. Laissons la parole à l’écrivain philosophe pour évoquer les débuts de l’artiste : « Et lui, dès l’âge de seize ans, cédant aux suggestions de ses parents qui voyaient accompli le déclin des Beaux-Arts, est entré dans ces écoles où l’art se renouvelait au contact de la science et de l’industrie, où l’affiche triomphait de la toile et l’épure du croquis… » (in Catalogue, exposition de groupe galerie Jacques Massol 1959). Dans un premier temps sur les conseils de Blaise Cendrars, il étudie à l’Académie moderne avec Fernand Léger et Amédée Ozenfant (1931), mais dès 1932 il part en Allemagne et travaille au Bauhaus de Dessau avec Kandinsky et Albers. En pleine montée du nazisme, il reçoit là l’enseignement le plus avant-gardiste qui soit, se mêlant sur le terrain aux expériences et découvertes plastiques, assistant à la naissance des théories les plus audacieuses dans une émulation intellectuelle rare, qui prendra fin avec les hostilités. Il étudie la publicité et les arts graphiques à Francfort avec Baumeister. 1936 le service miliaire le rappelle en France, puis c’est la guerre, la captivité en Allemagne. « Revenu de la guerre, je me suis vite aperçu que j’avais beaucoup à apprendre. J’ai commencé par la peinture figurative… Je ne suis pas devenu non-figuratif parce que je l’ai toujours été naturellement. Ainsi lorsque j’ai voulu m’exprimer, dire quelque chose de moi, m’engager j’ai ressenti aussitôt le besoin de peindre sans montrer des objets, réels ou imaginaires… « Faites ce qui vous passe par la tête » me disait Léger… Ce beau conseil de liberté ne pouvait s’appliquer pour moi que par la non-figuration » (in Jean Grenier, « Entretiens avec dix-sept peintres non-figuratifs »). Il peint alors dans un style abstrait géométrique dont le caractère décoratif lui semble un risque.

Dès 1947, il envoie une toile aux Surindépendants et participe à l’exposition de groupe « White and Black » avec Fautrier, Hartung, Wols, Georges Mathieu, Bryen, Seuphor, à la Galerie des Deux Îsles où l’année suivante il fait sa première exposition particulière, préfacée par Marthe Robert, écrivain, qu’il a rencontrée au Bauhaus et qui est devenue sa femme. On peut lire : «  Ce qui frappe avant tout dans la peinture de Jacques Germain, c’est qu’elle est la restitution, sur le mode impersonnel, d’une épreuve affective, soumise en dernier ressort aux lois invariables de la peinture… » Constatant que la magie de l’objet s’épuise et que la montée de l’abstraction est la conséquence de la régression accélérée de la pensée magique et fétichiste, elle précise : «  Un tel refus… ne ressortit jamais dans la peinture de Jacques Germain à une détermination théorique ou à un parti pris d’agressivité. Il est à la fois traduction d’une conscience aiguë de la dépossession des objets et moyens de défense contre la dépossession. Mais ce qu’il importe surtout de voir dans cette peinture qui se maîtrise pour tendre à la rigueur, c’est qu’en redistribuant la lumière, en privant la couleur de son monde corporel conforme à la tradition optique, elle se restitue à elle-même une architecture et un ordre ». Germain ne déviera pas de cet engagement, acquérant avec les années plus de liberté picturale, dans un éclatement coloré d’un extrême raffinement – caractéristique de sa peinture – , et en un enchevêtrement apparent seulement de lignes verticales et diagonales organisées dans des faisceaux chatoyants, tantôt qui s’élargissent ou bien se resserrent et dont la maîtrise ne dessert nullement cette effusion, ce lyrisme qui lui est si personnel.

En 1949 toujours, il expose aux Réalités Nouvelles, Salon auquel il sera fidèle jusqu’à aujourd’hui. C’est l’époque de sa grande amitié partagée avec Antonin Artaud rencontré en 1946 et auprès duquel il se rend chaque jour, pendant une période, pour travailler à ses côtés dans une pièce du pavillon de la Maison de la Santé où il est interné.

1951 exposition particulière Zimmer – Galerie Franck à Francfort.

C’est l’année où il débute au Salon de Mai qui l’invitera régulièrement jusqu’en 1962 et il figure à l’exposition « Tendance » Galerie Maeght avec Poliakoff, Pallut, Kelly et Palazuelo, pour laquelle Charles Estienne publie dans la revue « Derrière le miroir » (octobre 1951) un texte intitulé « L’Art est une réalité ».

1952 et 1953 Charles Estienne le fait participer à son Salon d’Octobre. 1953 voit sa seconde exposition particulière parisienne, Galerie Pierre. Ch. Estienne écrit : « Enfin, Germain est abstrait… mais il fait mieux encore : sur des rythmes simples, mais sans raideur il pose de larges touches de couleurs pures dont la clarté mélodique… sait s’imposer à qui a l’oreille fine. Étape par étape l’art de Germain a trouvé un ton dont la qualité et la modestie sont également exemplaires » (in « Et voici la rentrée des barbares », « L’Observateur » 6 juin 1953).

Expose pour le prix Lissone, Milan, et la galerie Dupont à Lille présente un ensemble de ses œuvres.

1954 exposition particulière préfacée par Pierre Courthion, galerie Michel Warren à Paris qui le présente de nouveau en 1956 (gouaches).

Ses prestations seront régulières : 1955 A.P.I.A.W. Liège.

1957 galerie Kaiser, préface de Guy Weelen.

1958 et 1959 galerie Jacques Massol.

R.V. Gindertaël pointe avec sa lucidité habituelle, sa sensibilité alliée à sa grande connaissance de la peinture, ce qui fonde la peinture de Germain, dans ce texte de première importance pour que nous le reproduisions : « La poétique de Germain… s’appuie sur des qualités picturales…  Sa peinture est, en effet, de substance savoureuse et ses harmonies colorées sont d’une complexité symphonique et d’une vibration tonale exceptionnelles…Non moins admirable que son métier et ses dons est la maîtrise avec laquelle il accorde ses élans lyriques à l’équilibre d’une composition dominée dans le moindre de ses détails et surtout aux constantes de son expression personnelle d’un mouvement intérieur à l’unisson des grands rythmes de la Nature non point visuellement remarqués et pittoresquement traduits, mais intuitivement perçus et manifestés par un acte pictural de participation. L’œuvre de Germain est l’une de celles, très rares encore, dans lesquelles s’affirme le dépassement de l’art abstrait conceptuel autant que celui des conventions figuratives, et qui retrouvent, à notre époque, par une voie naturelle le sens profond de la nature » (in « Les Beaux-Arts » Bruxelles 1959).

A la même époque, J. Grenier capte l’essentiel de cet art : « On est séduit dès l’abord par un foisonnement de tons…Il y a un jeu de transparences…au-dessous d’elles les couleurs vibrent, suivant des accords subtils et des harmonies raffinées… Ce sont ces carrés, ces losanges, ces trapèzes, ces rhombes qui se pressent en bataillons serrés et forment une texture substantielle…Toutes ces figures sont en mouvement dans une direction qui nous est suggérée plutôt qu’indiquée. Tout lyrisme digne de ce nom comporte sous-jacents, une ordonnance et un mouvement, une force intérieure… » (texte pour Germain in « Groupe » galerie J. Massol 1959).

En 1958, il présente parallèlement aux huiles ses gouaches chez André Schoeller.

1960 exposition d’huiles sur papier galerie Dina Vierny, Paris.

1961 Dessins galerie Adrien Maeght (préface de Guy Dumur) et tableaux galerie Kriegel, Paris.

1963 huiles sur papier et gouaches, galerie Le Divan, Paris.

1964 gouaches, galerie Melisa à Lausanne.

1965 galerie Kriegel qui l’expose encore en 1969.

Puis ce sont les expositions plus récentes : galerie de Messine (monotypes) 1967, galerie Bongers 1968, galerie Sapiro 1974 et en 1980 et 1984 galerie Coard.

Parmi ses expositions de groupe citons : 1954 Dessins, Centre Saint-Jacques. 1955 « Peintres d’aujourd’hui France-Italie » Turin ; « Le Mouvement dans l’art contemporain », préface de Guy Weelen, Musée de Lausanne ; « Pittsburgh International, pour le Prix Carnegie ; « Expression et création » galerie Art vivant, 1956 « International Sezession », Leverkusen. 1957 « Biennale de la Jeune Peinture », Pavillon de Marsan, Paris ; « Germain-Debré » galerie Michel Warren ; « Exposition internationale d’Art abstrait » pour la sortie du livre de M. Seuphor galerie Creuze ; « Biennale d’Art abstrait » Bordeaux 1958 « Cinq peintres français » avec Busse, Cortot, Dimitrienko, Ravel, galerie Birch Copenhague ; « Convergence », galerie Art Vivant ; « Peintres d’aujourd’hui » Musée de Senlis. 1959 « John Moore Liverpool Exhibiton », Liverpool ; « Ecole de Paris », Manheim. 1961 « Irish international Exhibition of Modern Art”, Dublin. 1962 “De la rive droite à la rive gauche” présentée par J. Massol et J.R. Arnaud Musée de Verviers, Belgique ; « Trente-six dessins contemporains » galerie J. Massol 1965 Biennale d’Alexandrie. Complétées par d’autres depuis. (Liste complète dans monograhie 1990).

Participe à Comparaisons en 1957 et 1964, à l’« École de Paris », galerie Charpentier, en 1956, 1957, 1960, 1961 et 1962,  Grands et Jeunes d’aujourd’hui et Salon d’Automne.

Pour cet homme discret qui s’exprime par la peinture, les explications sont vaines. Aussi quelques rares confidences sont-elles précieuses. Dialogue entre raison et instinct. « La composition n’est pas pour moi préétablie, elle est une création et une écriture simultanément et la solution d’un conflit qui dure tout le temps de l’exécution du tableau. »

Pour conclure : « Un tableau réconcilie avec la vie, ou comme le dit Van Gogh, un bon tableau est quelque chose de consolant. » (in Jean Grenier : « Entretiens avec dix-sept peintres non figuratifs » Calmann-Lévy 1963).

1968 Œuvres des années 50-60. Galerie Jacques Barbier. Paris. Catalogue.

1987 Œuvres récentes. Galerie Barbier. Paris.

1988 Œuvres 1950-1960. Galerie Arnoux. Paris.

1989 Petits formats récents. Galerie Barbier-Beltz. Paris.

Musées : National d’Art Moderne, Paris – Art Moderne de la Ville de Paris – Lille – Lausanne – Brême – Bergen – Oslo.

Jacques Germain Monographie. Biographie et bibliographie complètes (textes et écrits critiques). Ed. Jacques Barbier-Caroline Beltz. Paris. 1990.


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Marie CAMBAS

Dernière arrivée dans l’équipe, Marie est diplômée de l’Ecole du Louvre et de la Sorbonne en histoire et en histoire de l’art. Spécialisée en peinture ancienne, elle se tourne ensuite vers l’art Moderne et intègre la galerie en 2018.

[1] Lydia HARAMBOURG, L’École de Paris 1945-1965, Dictionnaire des peintres, Éditions Ides et Calendes, Neuchâtel, 2010, p. 198-200.

[2] Ibid.


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Maurice Estève : de la couleur des formes

Enfant de Culan dans le Berry, Maurice Estève est rapidement attiré par l’art, et se met à peindre dès l’âge de onze ans. C’est à Paris, où sa famille s’installe au sortir de la guerre en 1918, qu’il suit des cours de dessin qui le mèneront de façon précoce à utiliser le fusain, technique qu’il emploiera en parallèle de la peinture durant toute sa vie. Il s’inscrit dès 1924 à l’Académie Colarossi à Paris, après un passage d’un an à Barcelone en tant que décorateur de tissus, pour échapper aux réticences d’un père qui refuse que son fils prenne le chemin des arts.

Maurice Estève baigne à son retour dans le Paris des Avant-gardes et de l’art moderne. Expérimentant durant les années 1920-1930 le constructivisme de Cézanne, le cubisme de Braque et Picasso, mais aussi le pointillisme, Estève se nourrit de toutes les écoles durant sa formation, y compris du langage des Fauves et de l’onirisme de Giorgio De Chirico dont il adopte les visages de mannequins anonymes et les imposantes architectures à l’antique. Sa formation est d’abord figurative.

Estève percer l’influence inattendue de Fernand Léger, comme le soulignent les rédacteurs du catalogue raisonné de l’artiste : « Face à cette éloquente série {d’œuvres de l’année 1930}, on se souviendra de cette proposition capitale de Fernand Léger : « La couleur pure est une matière première formidable, aussi indispensable à la vie que l’eau et le feu ». Maintes fois réaffirmée par Estève, la référence à Léger a de quoi surprendre. On ne saurait, en effet, imaginer tempéraments plus dissemblables, et, à comparer mot à mot leurs œuvres, les liens sont loin d’être apparents. De tous les maîtres qui dominent à cette époque la scène contemporaine, Léger est certainement celui qui est le moins apprécié, en tout cas celui dont les recherches, mal perçues sur le moment, ne seront comprises que beaucoup plus tard. Et c’est ici, pour nous, l’occasion de saisir un des autres traits distinctifs de l’art d’Estève : l’étonnante capacité de s’enrichir d’apports extérieurs, voire étrangers, sans pour autant renoncer, même provisoirement, à l’originalité de son propre parcours. »[1]
Ainsi, Maurice Estève s’inspire librement et sans aucune servitude des grands maîtres contemporains de sa jeunesse, créant et renouvelant sans cesse une écriture personnelle et originale, où perce déjà un attrait indéniable pour la couleur et l’extrême stylisation des formes.

Le tournant des années 1944-1951.

Durant les années 1940, le choix des formes et des constructions des œuvres est de moins en moins fidèle à la réalité représentée. « Ces métamorphoses décisives s’accompagnent d’une nouveauté non moins déterminante : l’adoption par Estève, sous l’influence de Matisse, mais surtout de Bonnard, d’une gamme chromatique flamboyante. ». Maurice Estève s’affranchit du réel jusqu’à créer en 1944 l’œuvre Aquarium (n°236 du catalogue raisonné) où l’on ne distingue presque plus le sujet traité : « Tableau-témoin qui ouvre sur de nouveaux horizons, l’Aquarium (1944), par l’ambiguïté même de son motif, va se prêter à la mutation capitale qui est l’œuvre dans la peinture d’Estève. Tournant le dos à la traditionnelle stylisation du réel, l’Aquarium assemble en une seule vision différents angles de vue, multiplie les transparences, les décrochements, noue et dénoue librement les perspectives en y associant les jeux de l’eau et de la lumière, et, d’un réseau de branchages flottant comme des lianes, tire une intense rêverie soumise aux seuls aléas de la peinture, qui se voit ainsi dotée d’un langage autonome trouvant en lui-même les ressources de son propre développement. 

On ne saurait trop souligner l’importance de ce qui s’est accompli là. Un glissement sémantique y jette les fondements de toute l’œuvre future »[2].

En bref, l’année 1944 signe pour Estève le basculement vers l’art abstrait. Ce n’est toutefois qu’à partir de 1951 que le cap de l’abstrait est totalement franchi par le peintre, qui cesse de s’inspirer de sujets réels. Il rejoint dès lors toute une mouvance de l’art moderne représentée par de jeunes peintres contemporains, à l’instar d’Hans Hartung, de Georges Mathieu, de Jean Miotte ou d’André Lanskoy, chacun ayant une forme d’art abstrait bien spécifique. Reconnus et défendus par différentes galeries, ces artistes se côtoient, se connaissent, ou se croisent seulement, mais tous sentent le besoin de renouveler l’art par la voie de l’abstrait.

La maturité

L’œuvre Bula proposée par la Galerie Hurtebize a été réalisée en 1970. Elle est caractéristique du travail abstrait d’Estève, qui travaille par « couches sédimentaires » tantôt verticales, tantôt horizontales, avec des couleurs flamboyantes héritées de Bonnard et des fauves, des traitements lisses et des contrastes de matière qui cohabitent sur la toile. « Il arrive aussi que, pour accroître les obstacles, Estève contraigne son inspiration à se plier au format si particulier du « tondo » (Bula, 1970) »[3]. Le format rond est employé par Estève tout au long de sa carrière, mais se révèle tout de même assez rare, l’artiste travaillant le plus souvent sur des formats rectangulaires. Ce choix original renforce la préciosité du tableau, dont la technique à l’huile est, mis à part cela, tout à fait emblématique du travail d’Estève dès son entrée dans l’abstraction en 1951. Revenons à cette évolution capitale dans l’œuvre du peintre.

A partir de cette transition vers l’art abstrait, ou plutôt vers la « non figuration », la question se pose pour Estève de donner des titres à ses œuvres, dans la mesure où ces dernières ne représentent plus aucun sujet inspiré du réel. La réponse nous est donnée une nouvelle fois par Robert Maillard et Monique Prudhomme-Estève, les plus grands spécialistes de l’artiste et de son œuvre peint : « Simple moyen, à l’origine, de répertorier aisément chaque toile, ils n’ont évidemment pas été choisis au hasard : fruit du regard que le peintre porte sur son œuvre, une fois que celle-ci est achevée, ils tendent à souligner la vivante identité de chaque tableau, un peu à la manière dont un nom de baptême, tel un viatique, vous accompagne au seuil de la vie. Ils naissent à la faveur d’un jeu subtil fondé sur des associations tout autant visuelles et sonores qu’affectives et où s’exprime, de surcroît, l’âme d’un poète qui se souvient avec bonheur du terroir berrichon qui l’a vu naître et où, depuis 1955, il retourne régulièrement chaque année pour se ressourcer. »[4] On sent encore l’empreinte lointaine du surréalisme dans ces attributions, qui tiennent de l’inconscient et de l’instinct, tout comme sa peinture qui se dessine, s’efface et se recréée au gré des élans de son imagination. S’il convient de parler de « non figuration » plutôt que d’« art abstrait » lorsque l’on parle de l’œuvre de Maurice Estève, c’est que si le sujet est absent, l’évocation du monde qui l’inspire et des sens est, elle, toujours présente –voir plus loin notre Gros Plan sur les inspirations de Maurice Estève à travers la description de son style par les experts. En effet, comme le résument les spécialistes de l’artiste, « si les tableaux d’Estève échappent à la tyrannie du thème, ils n’en ont pas moins un « contenu » et tirent précisément de ce contenu, porté à son comble, leur surprenante irradiation »[5]. L’œuvre de Maurice Estève est donc un art puissamment poétique et évocateur, fondé sur l’énergie des courbes et des formes tout autant que des couleurs pures et éclatantes. Voici comment l’artiste lui-même raconte son geste créateur et décrit l’objet de son art : « Je ne me sers jamais d’esquisse, je peins directement sur la toile, sans dessin préalable. La couleur s’organise en même temps que les formes. Tout se cherche dans le format en chantier… Chaque œuvre est une suite de métamorphoses… En vérité une toile est pour moi une somme de reprises incessantes qui dure jusqu’à ce que je me trouve devant un organisme que je sens vivant (…) Il n’y a pas chez moi d’image préalable ; pas de forme que je souhaite a priori sur une toile. Au moment même où je peins, il s’opère un échange, une conversation s’établit entre moi et le tableau au fur et à mesure que celui-ci s’organise. »[6]

C’est donc au cœur de la création que se créée le discours poétique d’Estève, qui efface, rature, revient et recommence, jusqu’à trouver le geste qui traduira le mieux son intériorité, ne cessant de faire écho à ce qu’il connaît, voit et l’inspire – le Berry, la nature, les actualités… Cette création spontanée, les autres grands artistes de l’art moderne français, et plus précisément de l’art abstrait, l’ont employée. Chacun a réussi à élaborer à sa manière un dialogue sensuel avec la toile.

Ce que Maurice Estève « s’obstinait jadis à rechercher dans le monde extérieur, il le trouve désormais sur sa toile, lieu magique auquel se réduit momentanément l’univers et d’où va surgir cette topographie idéale, à l’abri des humeurs comme des saisons, qu’il ne se lassera pas d’explorer. « Je ressens, dira-t-il, plus intensément la nature dans laquelle je suis plongé par les formes que dans l’univers où je vis » »[7].

La Galerie Hurtebize à Cannes est fière de défendre l’œuvre dynamique et onirique de cet artiste totalement impliqué dans sa création, voie originale et inimitable de la « non-figuration », ce vaste courant polyphonique retracé par la Galerie à travers les œuvres d’André Marfaing, Pierre Soulages, Hans Hartung, Georges Mathieu, Jean Miotte, Jacques Germain, John Levée, André Lanskoy et autres aventuriers de l’art abstrait lyrique.

Gros Plan : Interpréter l’art de Maurice Estève en effleurant la réalité

C’est Robert Maillard et Monique Prudhomme-Estève qui connaissent le mieux l’œuvre peint de l’artiste. Dans le catalogue raisonné qu’ils dédient à Estève, ils racontent les inspirations du peintre au regard de son style inimitable, en prenant pour fondement son imaginaire : « De ces espaces muets, de ces contrées obscures, il rapporte d’étincelants trophées qu’il importe d’accepter et de déchiffrer avec la même ferveur, la même acuité que suscitent en nous des phénomènes aussi indescriptibles dans leur beauté qu’un coucher de soleil, que notre rencontre pour la première fois avec la mer, ou aussi énigmatiques dans leur foudroyante présence qu’un premier émoi amoureux.

Devant chaque toile il faut retrouver l’intime nécessité qui a conduit Estève à telle ou telle décision : ici, faire glisser insensiblement une lame de couleur pure jusqu’à ce qu’elle empiète sur sa voisine et y détermine par ricochet un frémissement, léger comme un murmure ; là, laisser se heurter deux masses colorées d’une égale intensité, confiant au tranchant de leurs arêtes le soin de les apparier ; ici encore, renoncer aux aplats aux profit de modulations balayant en douceur et en tous sens, tel un vent léger et capricieux, la surface totale de la toile ; ailleurs, distribuer d’épaisses coulées de lave entre des glacis incandescents… Chaque détail a son importance. Sollicitée de toutes parts, une lecture minutieuse et vigilante devra tenir compte aussi bien de la compacte unité de l’œuvre que de chacun des états particuliers qu’y revêt la matière picturale et dont le langage est impuissant à restituer l’inépuisable richesse. »[8]

Maurice Estève aura marqué de son empreinte l’art moderne français, en proposant un art abstrait inimitable, à la fois doux et suggestif, que la Galerie Hurtebize à Cannes est fière de présenter à travers un choix d’œuvres du peintre.

C’est Robert Maillard et Monique Prudhomme-Estève qui connaissent le mieux l’œuvre peint de l’artiste. Dans le catalogue raisonné qu’ils dédient à Estève, ils racontent les inspirations du peintre au regard de son style inimitable, en prenant pour fondement son imaginaire : « De ces espaces muets, de ces contrées obscures, il rapporte d’étincelants trophées qu’il importe d’accepter et de déchiffrer avec la même ferveur, la même acuité que suscitent en nous des phénomènes aussi indescriptibles dans leur beauté qu’un coucher de soleil, que notre rencontre pour la première fois avec la mer, ou aussi énigmatiques dans leur foudroyante présence qu’un premier émoi amoureux.

Devant chaque toile il faut retrouver l’intime nécessité qui a conduit Estève à telle ou telle décision : ici, faire glisser insensiblement une lame de couleur pure jusqu’à ce qu’elle empiète sur sa voisine et y détermine par ricochet un frémissement, léger comme un murmure ; là, laisser se heurter deux masses colorées d’une égale intensité, confiant au tranchant de leurs arêtes le soin de les apparier ; ici encore, renoncer aux aplats aux profit de modulations balayant en douceur et en tous sens, tel un vent léger et capricieux, la surface totale de la toile ; ailleurs, distribuer d’épaisses coulées de lave entre des glacis incandescents… Chaque détail a son importance. Sollicitée de toutes parts, une lecture minutieuse et vigilante devra tenir compte aussi bien de la compacte unité de l’œuvre que de chacun des états particuliers qu’y revêt la matière picturale et dont le langage est impuissant à restituer l’inépuisable richesse. »[8]

Maurice Estève aura marqué de son empreinte l’art moderne français, en proposant un art abstrait inimitable, à la fois doux et suggestif, que la Galerie Hurtebize à Cannes est fière de présenter à travers un choix d’œuvres du peintre.


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Marie CAMBAS

Dernière arrivée dans l’équipe, Marie est diplômée de l’Ecole du Louvre et de la Sorbonne en histoire et en histoire de l’art. Spécialisée en peinture ancienne, elle se tourne ensuite vers l’art Moderne et intègre la galerie en 2018.

[1] Robert MAILLARD et Monique PRUDHOMME-ESTÈVE, Estève, catalogue raisonné de l’œuvre peint, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1995, p.10-11.

[2] Robert MAILLARD et Monique PRUDHOMME-ESTÈVE, Estève, catalogue raisonné de l’œuvre peint, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1995, p.16.

[3] Robert MAILLARD et Monique PRUDHOMME-ESTÈVE, Estève, catalogue raisonné de l’œuvre peint, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1995, p.32.

[4] Robert MAILLARD et Monique PRUDHOMME-ESTÈVE, Estève, catalogue raisonné de l’œuvre peint, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1995, p.20.

[5] Robert MAILLARD et Monique PRUDHOMME-ESTÈVE, Estève, catalogue raisonné de l’œuvre peint, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1995, p.20.

[6] Maurice ESTÈVE, in Zodiaque, avril 1979 (1904-2001).

[7] Robert MAILLARD et Monique PRUDHOMME-ESTÈVE, Estève, catalogue raisonné de l’œuvre peint, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1995, p.31.

[8] Robert MAILLARD et Monique PRUDHOMME-ESTÈVE, Estève, catalogue raisonné de l’œuvre peint, Ides et Calendes, Neuchâtel, 1995, p.32.